VENTRI-LOQUE s. m. (Médicin) ce nom est formé
des deux mots latins venter, ventre et loqui, parler; il
répand au grec engastrimuthos; on s'en sert en médecin
pour désigner des malades qui parlent la bouche fermée, et
semblent tirer les paroles de leur ventre. Galen, in exeges, vocum.
Hippocr. Hippocrate fait mention de ces sortes de malades (epidem.
lib v. & vii.). il dit qu'on entend dans leur poitrine des sons
très distincts, semblables à ce que rendent certaines devineresses
inspirées par Python; voyez l'article suivant VENTRILOQUE
(art divinitat); et il attribue cet effet aux collisions de l'air
qui en traversant les bronches, rencontre des matieres visqueuses, épaisse,
qui s'opposent à la sortie. Saloman Reiselius parle d'un célèbre
buveur célibataire, âgé de 36 ans, nommé André
Stocklin, qui etoit plus exactement ventri-loque; cet homme
déjà sujet à bien d'autres incommodités, sentoit
depuis 6 ans des bruits assez considérables dans son ventre, assez
analogues au sifflement des viperes; les domestiques qui entendoient ce
bruit ne doutoient pas qu'il ne fût produit par quelque animal; le
malade rapportoient ces sons au-dessous de l'estomac, et quelquefois il
le sentoit monter jusqu'au cardia, ce qui lui excitoit des douleurs très-vives;
ce bruit augmentoit, aprés qu'il avoit mangé des alimens
doux, et les amres les dissipoient; cet homme étant mort, et son
cadavre ouvert, on trouve les intestins et l'estomac si distendus par les
vents, qui, à la moindre pression rendoient un son assez sensible,
à-peu-près semblable à celui qui se faisoit entendre
dans cet homme vivant (ephemer. natur. curios. decad.
II. ann. vij. observ. 13) Il n'est pas
difficle de trouver le raison de ces phénomenes; le bruit étoit
évidemment produit par les intestins distendus, lorsqu'ils rouloient
l'un sur l'autre, ou qu'il survenoit quelque spasme; et si ce spasme s'étendoit
jusqu'à l'orifice supérieure de l'estomac, l'air n'ayant
plus d'issue, distendoit ce viscere, occasionnoit une colique venteuse,
excitoit la douleur; les corps doux ou muqueux sont ceux qui contiennent
le plus d'air...
VENTRI-LOQUE (Art divinitat) devineresses connues aussi sur les noms d'engastrimuthoi et engastrimanteis, qu'on croyait rendre des oracles par le ventre; voyez Foësius oeconom. Hippocrat. Cette espece de divination est appellée par Aristophane euruklyeousmanteia, à cause d'un certain Eurycle, qui étoit bien décidement ventri-loque, et qui étoit affiché pour devin à Athènes; cependant elle paroît avoir été particulierement réservé aux pythonisses, auxquelles on donnoit indistinctement ce nom, et celui de ventriloque: les traducteurs de l'ancien et du nouveau Testament ont toujours rendu engastrimuthoi ou ventriloque par pythonisse. Voy. ce mot. Telle étoit celle dont il est parlé (Reg. lib I cap 28) qui évoqua l'ombre de Samuël à la priere de Saül. Telle est aussi, suivant S. Augustin (de doctr. christian, cap xxiii. lib II), cette femme dont il est question (act. apostol. c. xvi) qui étoit inspirée par Python. On doit distinguer deux facons de rendre les oracles par le ventre, pour faire accorder les auteurs qui ont écrit sur les ventri-loques; les uns ont assuré avec Ciceron (de divinitat. lib II) qu'elles recevoient le démon dans leur ventre, d'où elles tiroirent les réponses qu'ellles rendoient par la bouche; ils nous répresentent la pythonisse de Delphes montée sur le trépié, ecartant les jambes et attirant par en-bas l'esprit fatidique, ensuite pénétrée de cet esprit, entrant en fureur et répondant les oracles. Suivant d'autres, ces devineresses prophétoisent, la bouche fermée, faisant avec le ventre certains bruits qui signifioient tout ce que le spectateur crédule et intéressé vouloit; c'est à ces ventri-loques que Hippocrate compare les malades dont nous avons parlé. Voyez l'article précedent VENTRI-LOQUE, Médecin. Il y a aussi des ventri-loques, suivant Tertullien qui rendoient les oracles par les parties de la génération; un auteur moderne a dans un badinage ingénieux métamorphosé les femmes en ventri-loques de cette espece; Caelius Rhodoginus assure avoir vu une femme qui l'étoit réellement. cap x. lib VIII Adrien Turnebus rapporte qu'un homme qui couroit les pays, pouvoit,
sans remuer les levres, faire un bruit assez considérable, et proferer
distinctement quelques paroles, et qu'il tiroit beaucoup d'argent de tous
ceux qu'un phénomene aussi singulier attiroit après lui.
(m)
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Compiled by Steven Connor.
as part of The
Dumbstruck Archive, a continuing, online supplement to Dumbstruck:
A Cultural History of Ventriloquism (Oxford: Oxford University Press,
2000).